mardi 30 avril 2013

Dernières recommandations aux lecteurs par Alain Simon

 Alain Simon redonne les clefs pour effectuer la lecture :

 

Le passage de relais

Celui qui lit doit rester tonique jusqu'au bout, ne pas laisser croire qu'il va s'arrêter, ne surtout pas terminer en baissant la voix. Celui qui prend le relais doit être déjà à côté de lui pour les quatre ou cinq derniers vers, dans une attitude d'écoute de ce qui est dit,  et rentrer tout de suite dans la lecture, en vitalité, sans s'ajuster. Celui qui part peut rester quelques secondes à écouter avant de repartir, toujours dans l'écoute...

Les noms difficiles

Ralentir sur les noms difficiles, bien les prononcer pour être crédible, profiter de toutes les aspérités : " le tronc droit", "les affreux fauves",  comme pour les noms propres, les mettre en valeur par bref silence. Dans une énumération de noms, les individualiser.

Le rythme

Faire varier le rythme de la phrase, ne pas instaurer un système respiratoire et rester coincé dans des intervalles semblables, le sens implique quelquefois des phrases longues qui obligent même à aller au bout de son souffle.  Il faut trouver la rythmique de ce que l'on dit en imaginant ce qui est écrit. L'oral doit restituer la temporalité  et la topographie de la chose. Attention, quand on passe de la narration au dialogue, le rythme doit changer !

Le sens

- "Le sens, le sens, le sens !" - "La sensation, la sensation, la sensation !" Ne pas se laisser avoir par la petite musique du texte, mais en trouver le sens, le déplier pour celui qui écoute, avoir le souci d'être compris. Faire sentir les différences d'atmosphère : dans une même phrase, il y a des chevaux fringants et du pain qu'on dépose dans le char. Il y a le vivant et l'objet, cela doit se ressentir dans la voix.  De même, "il fit claquer son fouet" doit être prononcé avec une énergie qui éclaire ce qui précède et ce qui suit. Attention à ne pas renforcer les adjectifs avant le nom, c'est le nom qui importe. Ne pas accélérer les subordonnées. Tout ce qui est apposition, épithétique, doit être mis en valeur au service du sens : "ses truies que je garde", "un de ses fins ouvrages tels qu'en font les déesses".
On a droit au contresens, mais on n'a pas droit à la neutralité. Même, comme le dit Brecht, le narrateur-lecteur peut avoir un point de vue moral sur ce qu'il dit.

Et enfin

Il ne faut pas avoir honte des moments poétiques, mais profiter de l'aurore au doigts roses, et de la brume du soir qui envahit dans les ruelles...
Enfin s'il ne peut pas avoir de silence entre deux lecteurs, il peut avoir des silences à l'intérieur des textes !

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